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dimanche 24 novembre 2019

la dance folklorique kana

La célébration du 42ème  anniversaire de la création de l’Etat unitaire a connu divers formats selon les localités sur toute l’étendu du territoire. A Obala, une ville située à 40 kilomètres de Yaoundé (Centre-Cameroun), l’ambiance a été toute fois particulière. En plus des forces de défenses, élèves, partis politiques et société civile, l’on a noté la forte présence des groupes de danse traditionnelle. Zoom sur la danse Kana qui a arraché une salve d’applaudissements du grand public  présent à la place de fête de l’arrondissement.

Ils étaient une quinzaine, les ressortissants de l’ouest, plus précisément des haut plateaux de Bamboutos, qui sont venus fêter l’unité nationale avec le reste des camerounais. Leurs boubous aux couleurs traditionnelles Mbouda  (bleu-nuit et rouge) renseignaient déjà sur l’origine Bamiléké de ces derniers. Ici en plein cœur du peuple Eton, ces jeunes gens commerçants et étudiants ont fait l’objet d’une grande curiosité.

danse traditionnelle camerounaise
lesmiserables.mondoblog.org

En effet avant leur passage devant le sous-préfet, ils ont occupé un petit coin pour une courte séance de mise en condition. En plus de leurs tenues exceptionnelles, ils avaient avec eux : deux tambours immenses pour communiquer avec les ancêtres, deux calebasses sonores, deux clochettes, plusieurs épées, une flute (qui doit consommer du vin afin de pouvoir émettre un son), les tiges de « l’arbre de la paix » et le grand masque pour habiller le Njunju (personnage principal).  Le groupe est structuré de la manière suivante : les batteurs, les chanteurs et les danseurs sous la supervision d’un patriarche.

La danse Kana à en croire les propos du patriarche, est toute une symbolique et une histoire. Elle est inspirée de la tradition des chasseurs qui, après avoir attrapé un gibier, grimpaient sur un arbre et à l’aide de la flûte chantaient pour annoncer à la contrée que la chasse a été fructueuse. Une autre façon d’inviter tout le village au partage, une solidarité qui se déroulait dans une ambiance festive d’où la création de la danse de Kana, la danse du chasseur. Originellement, elle s’exécute la nuit autour d’un feu géant à l’occasion des manifestations heureuses ou malheureuses et souvent durant 7 jours.

Toujours dans la mythologie de la danse Kana, au cours de la réjouissance, le Njunju s’y invitait. Il s’agit d’une espèce de totem, dieu de la forêt qui vient revendiquer la paternité de l’exploit du chasseur car, sans sa bénédiction aucune chasse ne peut prospérer. Il revient aux organisateurs du festin de l’aménager honorablement au risque de provoquer sa colère.

Lors de la danse Kana, un des membres du groupe est choisi dans un très grand secret afin d’incarner le Njunju. On le vêt d’une longue robe et porte un masque, il est armé de deux flèches symbolisant la férocité du personnage, devant lui un lieutenant qui déblaye la voie pour laisser un passage libre au Njunju parce que dans son élan autoritaire et brutale il faut éviter de se frotter à lui. Derrière le Njunju, deux notables brandissent un « arbre de paix » pour implorer la tolérance de ce dernier en lui rappelant en permanence les valeurs de paix.

Masque Mbouda, ouest Cameroun
lesmiserables.mondoblog.org

Le masque que porte le personnage du Njunju est sculpté par un initié, le style et la forme dépendent du groupe de danse Kana. Cette année pour le 42ème anniversaire de la création de l’Etat unitaire à l’arrondissement d’Obala, les danseurs ont choisi un masque de bois possédant trois faces, car l’objectif du personnage du NjuNju c’est de faire peur, en plus il doit être énigmatique et mystique. Avec ces trois faces, explique le patriarche Fouomekon, il est difficile de le contourner ou de le maitriser, il regarde partout à la fois. Celui qui le guide est toujours muni d’un coq vivant représentant le gibier du chasseur. Durant la danse, les plumes sont jetées sur le Njunju, juste pour le rassurer que sa cote part du gibier est bel bien là à coté. A la fin de la danse le coq est dépouillé et découpé à main nue,  lors de la dégustation chacun retire son morceau en fonction de son grade dans le groupe.

Par ailleurs le personnage du Njunju est choisi parmi les personnes physiquement aptes, endurantes qui peuvent résister à la charge du masque pendant des heures et également contenir la chaleur intense que génère son accoutrement. C’est le njunju qui donne le pas de danse, les joueurs des instruments sont sélectionnés sur la base de leurs degrés d’initiation car selon le patriarche de circonstance « Le Kana reste une danse mystique, n’importe qui ne doit s’hasarder pour y prendre part ».  Plus loin il déclare : « il y a des choses que je ne dois pas dire, je suis tenu pas le secret d’initiation mais comprenez que quand on est au village, moi que vous voyer-ci j’entre dans le feu de bois sans me bruler ».

En outre avant d’engager la danse, l’approbation des ancêtres est préalablement requise à travers un rite, de même à la fin, il faut leur dire merci car le Kana se danse en symbiose avec ces derniers. Se sont eux qui protègent les danseurs et leurs communiquent le rythme. Il peut arriver qu’un danger soit signalé pendant la danse, les acteurs informés par les ancêtres écartent les moins initiés et changent de rythme pour y faire face.

La danse Kana est donc une valeur culturelle, symbole de l’unité, du partage et de solidarité d’où la motivation des danseurs de participer à leur manière à la célébration de l’état unitaire qui doit davantage consolider l’intégration nationale.

Selon le promoteur Mafouo Fodo « la mise sur pied d’un groupe de danse Kana en plein cœur du peuple Eton, loin de notre village natal (Mbouda) répond déjà à une exigence d’unité nationale. Avec nos moyens rudimentaires nous avons acheté le matériel nécessaire et mobilisé les gens pour que la culture de l’ouest soit plus représentée ici à Obala. Nous célébrons aujourd’hui la fête de l’unité nationale, les camerounais dans leurs diversités culturelles doivent exprimer en permanence leur vivre ensemble. Nous devrons être unis dans notre diversité, celle-ci ne doit pas être un frein à l’intégration mais une manne, une richesse que le bon Dieu nous a offert pour arracher ce titre d’Afrique à miniature(…). Je déplore juste que les autorités locales ne nous soutiennent pas assez et pourtant ils nous sollicitent régulièrement pour animer leurs événements ».

En sommes la prestation des danseurs du Kana lors de la fête nationale  a montré une fois de plus qu’en Afrique toutes les manifestations ou initiatives quelque soit leurs natures ne peuvent se dérouler sans un minimum de dosage culturel, traditionnel et mystique.

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